La parentalité adoptive...

Hier, nous sommes allés à une réunion sur la parentalité adoptive organisée par Médecins du Monde.

Nous étions 4 couples en attente d'apparentement :

- 2 pour le Vietnam (dont nous),

- 1 pour l'Ukraine,

- et 1 pour la Bulgarie.

Ce sont deux psychologues qui ont animé cette journée. Le repas du midi nous a été offert par MDM!

Ce fut vraiment une journée très sympa où nous avons pu échanger librement. Même si les sujets abordés étaient très sérieux, l'ambiance était détendue et on a même bien rigolé parfois.

Voici le contenu de cette journée:

1- Le choix du prénom.

Quelle histoire pour quel prénom? Il est conseillé de réfléchir pour pouvoir plus tard expliquer à l'enfant le choix de son(ses) prénom(s).

2- La valise des parents et le sac de l'enfant.

Lors de la première rencontre, ce que les parents et l'enfant apportent dans leurs bagages (concret et abstrait).

Ne pas oublier que l'enfant a un sac très rempli (rien de matériel mais une lourde charge sensorielle, émotionelle et sociale). Pour nous les parents, le projet est murement réfléchi et structuré. Il est choisi, ce qui n'est pas du tout le cas des enfants qui subissent et ne sont même, parfois, pas du tout préparés.

3- Visualisation d'un film montrant la première rencontre d'un petit garçon de 20 mois avec ses parents, puis les premiers jours ensemble.

Analyse de la rencontre et des réactions de l'enfant. L'enfant se protège (peur de l'inconnu) en se repliant sur lui même (mutisme) ou en rejetant les parents (pleurs).

On idéalise cette rencontre mais il faut s'attendre à une réaction  forte de l'enfant.

4- Un cas concret, celui de Léa.

Léa est une petite fille adoptée en Chine à l'âge de 11 mois qui:

• a été abandonnée par sa mère biologique au bord d'une voie ferrée où elle est restée pendant 2 jours environ.
• recueillie par le chef de police qui l'a trouvée; elle est restée 1 mois chez lui.
• A 1 mois, elle entre dans un orphelinat où ça ne se passe pas très bien.
• Au bout de 6 mois, elle est placée dans un famille d'accueil. Elle y reste 4 mois, jusqu'à son adoption.

La question qui nous était posée : comment pensez-vous que Léa va se comporter lors de la rencontre avec ses parents adoptifs?

La petite fille ne pourra pas faire confiance à ses parents. La peur d'une nouvelle rupture, d'un nouvel abandon l'empêchera de s'attacher.

Les parents adoptifs doivent être conscients que le processus d'attachement de l'enfant sera très long et passera par plusieurs phases. Il dépend beaucoup de l'histoire de l'enfant qui n'est pas forcément connue. De toute façon, il y a quand même dans sa vie au minimum ("dans le meilleur des cas", si l'on peut s'exprimer ainsi) déjà 2 abandons, 2 grosses ruptures (1.avec la mère biologique, 2.avec l'orphelinat). Donc inévitablement le processus d'attachement sera difficile et long. Pour que l'enfant accepte de faire confiance à ses parents et soit serein, des précautions importantes des parents sont indispensables.

5- Le C.A.A.A.S.E.

Les différentes étapes par lesquelles l'enfant passera à partir de la rencontre:

1.Choc: Recontre = choc qui dure de 48 à 72 heures.

2.Apprivoiser: Baisse progressive de l'hypervigilence de l'enfant. Il faut instaurer des rituels, ne pas hésiter à le toucher, le caliner, lui parler, ne pas le forcer à manger, accepter le retour en arrière (biberons, être beaucoup porté, faire la sieste avec les parents...) Faire avec cet enfant quelque soit son âge comme s'il était un nouveau né.

3.Adaptation (retour à la maison): 2-3 mois après la rencontre. Exclusivité des parents indispensable. L'enfant ne doit pas être porté par d'autres que ses parents, idem pour le nourrir, le laver, le coucher... Cette étape est nécessaire pour que l'enfant comprenne bien qui sont ses parents et arrive à se construire sereinement. Permanence des parents auprès de l'enfant (papa, maman ou les deux).

4.Attachement: environ 6 mois après l'arrivée. Sécurité. On peut commencer à tester la solidité de l'attachement. L'enfant peut commencer à être gardé mais pas plus d'1 ou 2 heures. Surtout pas en crêche, avec une personne que l'enfant connait déjà (grands parents, nounou...)

5.Séparation. L'enfant accepte d'être gardé sans angoisse et comprend que les parents reviennent toujours. Cette phase doit pouvoir se faire au plus tard un an après l'arrivée. Jamais des séparations de plus de 48 heures pendant 2 ans .

6.Equilibre.

Dans ces étapes, il y des retours en arrière possibles. Les délais donnés sont fluctuants mais l'enfant doit progresser dans ce sens. Ne pas hésiter à se faire aider en cas de difficultés.

Les psychologues ont bien insisté sur l'importance de la permanence et de l'exclusivité des parents au retour à la maison. C'est ce point qui a le plus bouleversé dans nos plans. Nous imaginions mettre notre petit bout à la crêche... Changement complet de programme, j'envisage maintenant un congé parental après le congé maternité. Les grand parents, les taties... devront être patients; ils ne pourront pas le porter où s'en occuper au début et pendant quelques mois comme nous avons pu le faire avec mes petites nièces.

Décidément, quel chamboulement l'arrivée de ce petit ange! Il va falloir qu'on en parle pour que tout le monde comprenne bien et qu'il n'y ait pas de complications quand il sera là.

6-Les causes de l'abandon.

Certaines causes très violentes peuvent être très difficiles à accepter par les parents et encore plus difficiles à révéler à l'enfant au moment inévitable des questions.

Toute verité est-elle bonne à dire?

Il faut quand même préparer l'enfant en cas de situtation très dure car à partir de 18 ans, il a la possibilité de consulter son dossier.

L'histoire de l'enfant ne doit pas être révélée, même à la famille (Les risques de fuites inévitables sont trop grands).

Cette histoire très intime lui appartient; c'est à lui de décider, quand il est en âge de le  faire, de la divulguer ou non.

7-Ce que les hommes attendent de leurs épouses et inversement.

Les hommes demandent à leurs femmes:

- un soutien moral,

- de leur laisser leur place auprès de l'enfant,

- de ne pas délaisser la vie de couple.

Les femmes demandent à leurs maris:

- de la solidarité,

- de l'autorité sur l'enfant,

- un soutien dans l'intendance.

Voilà ce que nous pouvons vous livrer de prime abord sur cette journée très riche (vous avez pu vous en apercevoir).

Une autre journée est prévue en mars.